Bonjour,
Chers parents,
Depuis que j'ai reçu votre dernière lettre beaucoup d'évènements se sont produits dans notre secteur.
Lundi, les Allemands ont lancé une violente attaque contre notre position, cela a commencé par un bombardement qui a duré plus de 24 heures, c'était sans arrêt, impossible de dormir, la terre semblait voler dans des gerbes d'explosions, le sol tremblait, j'ai reçu un morceau de fer sur la tête, mon casque m'a sans doute sauvé la vie mais je suis resté étourdi plus d'une heure.
Ensuite, ils se sont lancés à l'attaque par vagues successives, les mitrailleuses aboyaient autour de moi, je voyais les ennemis bondir vers nous, j'entendais des cris et des explosions, je visais puis tirais sans arrêt.
A un moment, j'ai vu un Allemand franchir nos barbelés et foncer droit sur moi, sa baïonnette visant ma tête, j'étais au bord de la tranchée, j'ai eu peur, j'ai eu le réflexe de tirer, c'était la dernière cartouche de mon chargeur, l'homme s'est écroulé à quelques mètres et son casque a roulé près de moi.
Nous avons repoussé l'attaque mais Vincent et marcel ont été tués, Charles a reçu des éclats de grenades, on l'a évacué à l'arrière.
Quand il pleut notre tranchée devient une mare de boue, les rats courent partout, je marche entourés de cadavres d'hommes et de chevaux, c'est horrible, on a l'impression de vivre un cauchemar qui ne finit jamais.
La nuit, on envoie des patrouilles, parfois les hommes ramènent un prisonnier, le capitaine l'interroge.
Nous gelons au fond de nos tranchées, je me sens sale et mal rasé, j'ai les yeux brûlants par manque de sommeil, le quart de vin est une infecte piquette.
A Ypres, les Allemands ont lancé des gaz asphyxiants, ils y a eu beaucoup de morts mais les Anglais les ont refoulés.
J'espère que vous allez bien et que Juliette accouchera bientôt.
Au milieu de cet enfer, je pense bien à vous et vous embrasse.
Votre fils.
Victor.
Voilà, j'espère t'avoir aidé.
Passe un bon dimanche.
