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La République est une œuvre majeure de Platon, dans laquelle le philosophe s’interroge sur ce que pourrait être la Cité juste, la société idéale par excellence. Notre extrait se situe dans le dernier chapitre de l’ouvrage, au moment où Socrate et ses interlocuteurs s’interrogent sur la place éventuelle de l’art et des artistes dans une telle société. Considérés comme des imitateurs, dont les œuvres ne sont que de simples reflets déformés et déformants du réel, Platon, par la bouche de Socrate, présentent les artistes comme des faiseurs d’illusions plutôt que des vecteurs de vérité. Dans les lignes qui suivent, Socrate poursuit son analyse critique des artistes et de leurs productions en prenant le théâtre tragique comme exemple…

« Nous n’avons pas encore accusé la tragédie du plus grave de ses méfaits. Qu’elle soit en effet capable de corrompre même les gens raisonnables, à l’exception d’un petit nombre, voilà sans doute ce qui est tout à fait redoutable.

Assurément, si elle produit cet effet. Écoute, et considère le cas des meilleurs d’entre nous. Quand nous entendons Homère ou quelque autre poète tragique imiter un héros dans la douleur, qui, au milieu de ses lamentations, s’étend en une longue
tirade, ou chante, ou se frappe la poitrine, nous ressentons, tu le sais, du plaisir, nous nous laissons aller à l’accompagner de notre sympathie, et dans notre enthousiasme nous louons comme un bon poète celui qui, au plus haut degré possible, a provoqué en nous de telles dispositions.

Je le sais; comment pourrais-je l’ignorer !

Mais lorsqu’un malheur domestique nous frappe, tu as pu remarquer que nous mettons notre point d’honneur à garder l’attitude contraire, à savoir rester calmes et courageux, parce que c’est là le comportement d’un homme, et que la conduite que nous applaudissions tout à l’heure ne convient qu’aux femmes.

Je l’ai remarqué.

Or, est-il beau d’applaudir quand on voit un homme auquel on ne voudrait pas ressembler - on en rougirait même - et, au lieu d’éprouver du dégoût, de prendre plaisir à ce spectacle et de le louer ?

Non, par Zeus ! cela ne me semble pas raisonnable. »

Platon, République, Livre X, 605c-605e, traduction Robert Baccou, Garnier, 1936, revue

Question d’interprétation philosophique
Quel peut-être le pouvoir d’une fiction comme la tragédie sur son spectateur ?


Sagot :

Duna87

Réponse:

Bonjour

Le passage de Platon souligne le pouvoir de la tragédie sur le spectateur en mettant en évidence son influence sur les émotions et les comportements. Selon Socrate, la tragédie peut avoir un impact profond sur les individus, même les plus raisonnables, en les poussant à ressentir des émotions intenses, telles que la sympathie envers des personnages tragiques.

Socrate examine comment la tragédie peut influencer les réactions émotionnelles du public. Lorsque le spectateur écoute un poète tragique dépeignant un héros dans la douleur, il ressent du plaisir et de la sympathie envers le personnage. Cette identification émotionnelle peut aller jusqu'à l'enthousiasme et à l'approbation du poète qui a suscité de telles émotions.

Cependant, Socrate soulève la question de la cohérence entre cette réaction émotionnelle et le comportement attendu dans la vie réelle. Il pointe du doigt une possible incohérence entre l'approbation des émotions intenses générées par la tragédie et la volonté, dans la vie quotidienne, de maintenir un comportement calme et courageux face à des malheurs réels.

Ainsi, Platon, par le biais de Socrate, interroge le pouvoir de la fiction tragique à influencer non seulement les émotions, mais aussi les valeurs et les comportements moraux des spectateurs. Cette réflexion soulève des questions plus larges sur le rôle de l'art et de la fiction dans la formation de la moralité et sur la capacité des œuvres artistiques à façonner les attitudes et les actions des individus dans la réalité.

Bonjour, je suis d’accord avec notre réponse elle est très bien expliqué vous fera gagner une bonne note